Compte-rendu de l’audience du 20 octobre 2009


Général / mardi, octobre 20th, 2009

Ce 20 octobre s’est tenue une nouvelle audience du procès Fortis, audience où 18 avocats étaient présents pour s’opposer à Maître Modrikamen et son associé Maître Bonhivers.

Avant même le début de l’audience s’est posé une question sur la recevabilité des pièces. Maître Modrikamen a rappelé qu’il avait remis ses conclusions dans le calendrier convenu (15 juillet dans son cas) alors que Fortis avait encore déposé des conclusions additionnelles la veille, soit bien au-delà des délais fixés (31 août dans leurs cas). Fortis lui oppose qu’il a lui-même remis une nouvelle version de son CD-ROM de pièces après le 31 août.

Il est proposé que seules les pièces déposées avant le 31 août soient prises en compte. Fortis oppose que, dans ce cas, Monsieur de Pitteurs (le scrutateur à l’AG du 28 avril) ne pouvait être entendu. Maître Modrikamen souligne que Monsieur de Pitteurs agit comme intervenant volontaire et qu’il n’est pas son client. Qui plus est, désormais, Monsieur de Pitteurs agit également désormais comme actionnaire faisant intervention volontaire ; il a d’ailleurs son propre avocat (qui n’a pas eu l’occasion de dire un mot durant cette audience mais qui aurait également remis des conclusions le veille).

Le président souligne qu’il veut éviter absolument qu’il y ait des sur-conclusions qui n’en finissent plus. S’il est disposé à accepter de nouvelles conclusions (si les parties sont d’accord entre elles), il ne veut pas que ça s’éternise.

Au final il est décidé que les pièces post 31/08 sont acceptées à titre provisioire et que le président tranchera  ensuite pour voir si il en tiendra compte.

Le cas de Monsieur de Pitteurs n’est pas tranché. Rappelons au passage que le scrutateur avait refusé de signer le PV de l’AG du 28 avril ce qui laisse à penser qu’il considérait cette dernière comme irrégulière.

Après 45 minutes passées sur ces considérations, commence enfin la plaidoirie de Fortis menée par Me Lefèvre.

Elle commence par dire au président que les mesures avant-dire droit demandées par Me Modrikamen sont des mesures qui peuvent avoir des répercussions graves. Elle souligne que s’il y avait vraiment urgence il fallait faire un référé.

Elle dit ensuite que selon le décompte qu’elle a effectué, Me Modrikamen ne représenterait que 9 millions de titres et pas les 14 qu’il avance. Elle souligne que ça ne représente donc que 0,33% du capital et argue même qu’il n’y a pas un seul de ses demandeurs qui soit valable (sic !).

Elle rappelle ensuite que la décision prise par le conseil d’administration le 3 octobre était valide et que le fait que les actionnaires aient dit NON le 11 février ne changeait rien. Elle dit notamment que la Cour d’Appel n’a PAS, dans son arrêt du 12 décembre, reconnu que la décision du conseil était caduque à cause de la non-organisation d’une AG.

Elle précise également qu’une action en bourse représente toujours un risque important et qui est généralement bien rémunéré ; ce qui fut le cas pour l’action Fortis pendant des années.

Elle rappelle aussi que lors de la débâcle de Fortis les candidats ne se pressaient pas au portillon et que les meilleures offres représentaient à peine 1,5 EUR par action. Elle insiste sur le fait que la commission européenne a d’ailleurs qualifié la première intervention, l’augmentation de capital autorisée à hauteur de 4,7 milliard, d’aide d’état car ce montant était supérieur à la valeur estimée. Cela fait donc dire à Fortis (sic) que la deuxième opération, l’achat de 50% restant de Fortis banque Belgique pour 4,7 milliards, était également beaucoup trop élevée (et oui c’est bien Fortis, qui par la voie de Me Lefèvre, se plaint que sa propre banque a été payée soi-disant trop cher).

Oubliant volontairement le fait que l’état belge aurait pu se porter garant, elle précise que vu l’urgence il était impossible d’organiser une Assemblée Générale. A la réplique de maître Modrikamen à propos de la garantie octroyée à Dexia, elle répond d’une part que Dexia avait un actionnariat stable ce qui a justifié l’octroi de cette garantie dés le 9 octobre, et d’autre part qu’une telle garantie a été également octroyée à Fortis dés le 16 octobre (après la signature de la convention donc).

Elle précise encore que sans le funding de la BNP, Fortis se serait écroulé à ce moment. Elle explique qu’en parallèle, le cours de l’action Fortis a baissé (ce qui est faux car le lundi 28 septembre le cours était de 3,967€ alors que le cours à la clôture le vendredi 3 octobre était 5,422€ ; il n’y a donc aucun recul du cours de l’action et au contraire une progression de 36,6%).

Elle dit que les 5 experts désignés par la Cour d’Appel à la demande de Modrikamen n’ont jamais, eu égard aux circonstances, reconnus le caractère lésionnaire de l’opération. Elle attaque frontalement Modrikamen qui, selon elle, n’a critiqué l’indépendance des experts qu’après la remise de leur rapport intermédiaire (ce qui est faux car il se plaignait déjà avant la remise du rapport, de ne les avoir rencontré qu’1/4 d’heure). Elle précise que le rapport intermédiaire remis pour organiser l’AG du 11 février fut en définitive le rapport final car Me Modrikamen n’a pas accepté de payer la suite de leurs honoraires.

Me Modrikamen, quand à lui, rappelle qu’un des experts, Monsieur Gillon, n’a jamais signé ce rapport alors même qu’il avait prêté serment. Cette non-signature rendrait selon lui le rapport nul. Rappelons au passage que ce qui avait fait dire à ces experts que le stand-alone envisagé à l’époque n’était pas possible était le fait que les autorités belges le refusaient catégoriquement.

 

Selon Fortis, il n’a pas signé simplement parce qu’il n’est pas assuré pour.

Pour arguer le fait que la solution BNP était la meilleure, elle souligne que même les administrateurs nommés à cette AG du 11 se sont ralliés à cet argument (en ce compris le candidat proposé par Ping An). Elle rappelle aussi que de candidats de Deminor se sont désistés suite au rejet du projet BNP.

Elle rappelle également que Me Modrikamen demande l’annulation des décisions prisent le 3 octobre 2008 alors qu’entretemps ce sont d’autres dispositions qui ont été approuvées le 28 avril 2009.

A propos de l’AG du 28 avril, elle rappelle que la juge De Tandt ava
it débouté Me Modrikamen la veille de sa tenue. Ce dernier demandait en extrême urgence l’annulation du droit de vote de certaines actions litigieuses. La juge De Tandt avait fondé sa décision sur le fait que la cour d’appel avait tranché la question le 10 mars (ce qui est faux car cette demande du 27 avril de Me Modrikamen portait sur des titres qui étaient litigieux car leurs propriétaires agissaient de concert et n’avaient pas remplis les formalités).

Toujours à propos de cette AG du 28 avril, elle dit que des actionnaires historiques avaient changés d’avis. Elle cite notamment ABP et GGGM. Elle précise aussi que s’il y avait de nouveaux actionnaires à l’AG du 28 avril, c’est forcément qu’il y avait eu des vendeurs.

Pour finir les débats à propos de cette AG du 28 avril, elle souligne que Deminor n’a fait aucune demande à ce propos.

Elle termine enfin en rappelant que Fortis n’est pas la coquille vide telle que souvent présentée ; elle dit que c’est une entreprise qui emploie 10.000 FTE (c’est en réalité Fortis Insurance et pas le holding mais soit), qui est rentable, qui a beaucoup de cash et qui s’apprête à verser un dividende.

Après la reprise, s’ensuit une contestation, fort technique, de la compétence du tribunal.

L’état néerlandais plaide ensuite à propos de l’immunité de juridiction dont il dispose. Il est représenté par Me Koen Van den Broeck.

Il tient cependant à apporter des éclaircissements à propos du déroulement des faits. L’état néerlandais précise qu’il a découvert dans « l’entre-deux week-end », que Fortis Insurance avait été laissé en garantie à l’état belge ce qui changeait fort la donne. Qui plus est, vu la prise en main par l’état belge, l’état néerlandais craignait pour ses propres intérêts.

Pour justifier la reprise des activités hollandaise, l’état néerlandais argue que même Fortis l’envisageait dés le mercredi.

A propos de l’argument qui consiste à dire que le CA de Fortis a été mis hors-jeu (ce qui avait été reconnu par la Cour d’Appel qui avait même qualifié cette mise à l’écart de voie de faits), les bataves prétendent que c’est faux car les administrateurs Hessel et Bodson ont obtenus le remboursement des dettes à long terme de Fortis Bank Nederlands.

L’avocat souligne ensuite qu’à l’origine Me Modrikamen demandait l’annulation des 4 cessions qui avaient eu lieu (Fortis Bank NL, Fortis Verzekeringen NL devenu entretemps ASR, Fortis Corporate Insurance et ?) alors qu’il ne demande désormais plus que l’annulation de la cession d’ASR.

Il termine la présentation de la situation en soulignant qu’à l’heure actuelle, Fortis Bank NL n’est toujours pas dans une situation enviable.

S’ensuit un long débat technique sur l’immunité de juridiction dont pourrait bénéficier l’état néerlandais. La question étant de déterminer si les actionnaires ont subis un dommage matériel ce qui n’est pas le cas selon les hollandais car il ne s’agissait que d’une moins value réalisée. Le président met l’avocat de l’état néerlandais en difficulté demandant de préciser le caractère tangible ou non des actions.

La séance est ensuite suspendue vu l’heure.

Le cas du scrutateur/intervenant volontaire de Pitteurs n’est toujours pas tranché mais le président précise d’emblée qu’une telle audition risque d’être « hors-propos ». Il craint visiblement que l’audition de Monsieur de Pitteurs n’engendre une pluie de conclusions des autres parties qui qualifie déjà l’homme de « témoin déguisé ».

12 réponses à « Compte-rendu de l’audience du 20 octobre 2009 »

  1. Pourquoi de Pitteurs ne fait il pas une déclaration publique si on ne lui permet pas de témoigner : il faut que la vérité éclate.

  2. Voir sur GOOGLE, le blog en question
    Voir Le GIF (Groupe d’Information sur la fraude) sur FACEBBOK
    Voir 4774 (FR) de la Cour Constitutionnelle de Belgique
    Voir requêts en Cour de Cassation du 24 juin 2009
    Voir FAX adressé au Tribunal du Commerce de Bruxelles
    Voir réaction Test Achat, très tôt, au courant de ce qui se passait

  3. Merci beaucoup pour ce compte-rendu , clair et complet.On peut constater que l’avocate de Fortis à lancé plusieurs affirmations fausses et que Mr de Pitteurs n’a que très peu de chance d’être entendu , vu la réaction du Président.
    Encore merci et rès bonne journée.

  4. Bonsoir Thibs,

    Merci pour ce compte-rendu. Je suis à l’étranger depuis nos derniers mails échangés et un peu déconnecté car j’ai pas beaucoup de temps mais je m’intéresse toujours à ce qui c’est passé ce fameux W-E où beaucoup de gens ont été lésé.
    Bonne continuation et sois moi négatif envers toi-même (voir titre de ton blog !)
    JEM

  5. Un tout grand merci ! Enfin un texte complet à ce propos ! Quant on voit le contenu de la dépêche de l’agence Belga sur le même sujet il y a de quoi rester pentoi ! Ferez vous un résumé de l’audience de demain ?

  6. @VASY : Malheureusement je n’ai pas eu l’occasion d’y aller et je n’ai pas encore parlé avec quelqu’un qui y étais.

    Par contre je serai à la prochaine mardi … et le même jour dans l’après-midi je fais quelque chose d’autre à ce propos mais que je ne peux pas écrire ici 😉

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